dimanche 29 novembre 2009

The Walker Review sur la Gouvernance : un important rapport que l’on aurait tort de réduire à ses recommandations sur les bonus





Le rapport de David WalkerWalker Review of Corporate Governance of UK Banking Industry »),que l’on trouvera en lien , a retenu l’attention par ses recommandations sur les politiques de rémunération et les bonus, terrain déjà balisé par les Recommandations de FSA. Walker va toutefois un peu plus loin en préconisant une publication statistique des plus hautes rémunérations (au delà de 1 m£) et un étalement du versement des bonus non pas sur 3 ans, devenu la norme, mais 5 ans.

Mais c’est le petit bout de la lorgnette. En se focalisant excessivement sur les bonus (voir notre post passé :Bonus, pourquoi tant de haines? en lien), on passe à coté de facteurs qui ont été plus déterminants comme fauteurs de crise.

Un facteur très important, qui a été peu discutée jusqu’à maintenant, est la question de la Gouvernance des banques, du fonctionnement de leurs boards et de l’organisation de leur Risk Management .C’est précisément l’objet du rapport Walker.

La crise ,en effet, a révélé de graves dysfonctionnements en la matière avec :

-des CEO souvent omnipotents face à des boards impotents , et parfois incompétents (de Lehman à RBS en passant par UBS)

-un risk management qui n’était pas à la hauteur de ce l’on pensait, en particulier concernant les risques de marché que l’on considérait comme bien maitrisés à un point tel que Basle 2 les avaient initialement négligés en se focalisant sur les risques de crédit et le risque opérationnel (pour récemment multiplier par 3 le capital requis pour le « trading book »)

-et, du coup, une forte hétérogénéité entre bonnes et mauvaises pratiques concernant Gouvernance et risk management, qui a fait la ligne de partage, dans la crise, entre les banques « gagnantes » et « perdantes »
Le Financial Stability Forum (FSF), sous l’égide de Mario Draghi, a publié une étude faisant un état des lieux post-crise des bonnes et mauvaises pratiques en matière de risk management. C’est une étude, tout à fait remarquable, qui n’a pas eu l’écho qu’elle aurait mérité (on la trouvera en lien).

L’étude distinguait, dans le spectre des pratique de risk management, deux extrêmes (l’approche « en silo » d’une part et l’approche « transversale » d’autre part) :

-l’organisation et l’approche « en silos », tant au niveau des métiers que de la Direction des Risques, a conduit parfois à la catastrophe. Ainsi les risques de marché étaient souvent traités par un autre circuit que les risque de crédit, ce qui a pu conduire à analyser les produits structurés à base de subprime en tant que produits de marché sans bien tenir compte ,au fonds de l’essentiel,le risque de crédit lié au sous jacent immobilier. Ceci était d’autant plus regrettable que ,sous l’effet d’arbitrage réglementaires, les produits de marché étaient souvent, en fait, le repackaging de produits de crédit ou de financement .Le livre sur la chute de Lehman (« A colossal failure of common sense » montre bien aussi les effets funestes de cette approche en silo :le Département en charge des RMBS-CMBS emmagasinait à tour de bras des produits structurés immobiliers et à base de subprime sur lesquels il avait une vision très allante alors que le Département voisin Fixed Income avait, quant à lui, une vision très « Bearish » mais était tenu complètement dans l’ignorance

l’autre bout du spectre, les bonnes pratiques sont celles des banques-généralement les gagnantes de la crise- qui ont su avoir une approche « transversale » entre les métiers et les risques (en particulier marché et crédit)au sein de la Banque et dans ses circuits risques. Goldman Sachs personnifie cette approche où les points de vue des différents marchés, des différents métiers sont confrontés en permanence, ce qui au cas d’espèce est l’héritage de l’origine partenariale (« Partnership ») de la firme.

Le débat sur ces sujets n’a pas vraiment eu lieu. Justement la Walker Review le relance sous l’angle de la Gouvernance.

Quels sont les principes de fonctionnement qui devraient s’imposer quand on tire les leçons de la crise et des bonnes pratiques ?

1)La nécessité d’une approche transversale (anti silo) entre les risques (crédit, marché, opérationnel, liquidité, réputation) et entre métiers (actions, Fixed Income, Financing, Commodities)qui peuvent d’ailleurs donner des indications contradictoires. Ceci ,il est vrai, n’est pas si simple à mettre en œuvre dans des firmes qui n’ont plus la dimension, ni le caractère, des parnership d’antan et qui sont devenus des organisations globales, matricielles et multi-pays. Mais, par exemple, l’organisation de comités de risques que Michel Pébereau a mis en place à BNP Paribas est assez exemplaire à cet égard et s’est avérée payante.

2)Une position forte et pleinement indépendante du Directeur des Risques (CRO), rattaché directement au CEO (chez Santander, où E Botin a toujours accordé une importance première à la gestion des risques, le patron des risques est le n°2 et vice-chairman de la banque) et, à notre sens, rapportant aussi directement au Board (ce qui est d’ailleurs une recommandation de la Walker Review)

3)Un board composé d’Administrateurs qualifiés capables de comprendre et de controler les risques encourus par la banque. C’est ce sur quoi se focalise le rapport Walker qui préconise ,en particulier, que le board désigne en son sein un Comité des Risques, distinct du Comité d’Audit considéré comme trop absorbé par la revue des comptes et n’ayant donc pas suffisamment de disponibilité pour le suivi des risques

Ce rapport est important en ce qu’il met l’accent sur la bonne Gouvernance des banques, notamment en matière de risques et de rémunérations, Gouvernance qui, il faut bien le dire, a particulièrement dysfonctionnée dans les banques UK, à quelques brillantes exceptions.

« Sir David » avait tout le pédigrée dans la City pour patronner un rapport faisant autorité ,en tant qu’ancien « Executive Director » de la Banque d’Angleterre et ex Chairman de Morgan Stanley International. Mais son rapport mériterait d’être repris ailleurs.

En lien:
-Le rapport sur les bonnes pratiques de Risk Management du FSF:http://www.newyorkfed.org/newsevents/news/banking/2008/SSG_Risk_Mgt_doc_final.pdf
-La Walker Review:

-Post passé:Bonus,pourquoi tant de haines:

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